Pendant plus de quatre décennies d’existence, L’espoir, c’est la vie a soutenu et redonné du courage à des milliers de femmes atteintes de cancer du sein. Aujourd’hui, nous sommes fiers de célébrer une de nos anciennes collègues, Karen Malkin-Lazarovitz, qui fait sa marque dans le monde et dans la vie des femmes.

Souvent, une femme se trouve face à bien peu de choix après une mastectomie. Une des options est de laisser la cicatrice telle quelle. Mais chaque fois qu’elle se regarde dans le miroir, ça lui rappelle son diagnostic, ses traitements et l’opération chirurgicale.

Une autre option est de passer par la reconstruction du sein qui peut être douloureuse ou entraîner des complications nécessitant d’autres opérations. Certaines femmes choisissent la reconstruction du sein non pas parce qu’elles le veulent, mais parce qu’elles ressentent de la pression, réelle ou perçue, de leurs proches, des médecins ou de la société.

Heureusement, cette situation est en train de changer et les femmes peuvent maintenant profiter d’autres alternatives. L’une d’entre elles est le tatouage.

La beauté définie par la femme

« Les patientes touchées par le cancer devraient avoir d’autres choix que la reconstruction mammaire ou la poitrine plate, explique Karen. Je veux leur donner l’occasion de définir la beauté dans leurs propres termes. »

À l’âge de 33 ans, Karen a découvert qu’elle était porteuse de la mutation du gène BRCA2. Cela lui donnait 87 % de chances de développer un cancer du sein et 40 % de chances d’avoir un cancer de l’ovaire.

Pour éviter ce sort, elle a choisi de subir une hystérectomie, une oophorectomie (ablation des ovaires) et une mastectomie. Elle a opté pour une reconstruction des seins, ce qui a entraîné des complications et 8 autres opérations.

Après la cinquième opération, les médecins l’ont encouragée à faire une reconstruction des mamelons et des aréoles. Mais elle en avait assez et a décidé de chercher d’autres moyens de dissimuler ses cicatrices. Elle a ainsi trouvé quelqu’un prêt à tatouer par-dessus.

Photo : Sophy Holland / Inked Magazine

Elle a publié les résultats sur Facebook. Tant de femmes ont démontré de l’intérêt que Karen a commencé à chercher comment son expérience pouvait faire une différence dans la vie des femmes.

Sa solution : établir un partenariat avec des artistes du tatouage et offrir des tatouages gratuits aux femmes qui avaient eu une mastectomie. En 2017, elle s’est associée avec une organisation américaine, Personal Ink. Durant cette association, elle a fourni 23 tatouages.

En mai 2022, elle a créé son propre organisme à but non lucratif, EMPOWERink, et a déjà fourni 42 tatouages.

Comment les tatoueurs sont-ils choisis ?

Selon Karent, tatouer une personne qui a eu une mastectomie est particulièrement délicat. « Vous avez affaire à une femme qui a déjà subi un traumatisme émotif dans cette zone, confie-t-elle. L’artiste doit donc faire preuve de sensibilité à l’égard de la personne. Pour beaucoup, c’est une expérience très intime. Pour la première fois depuis leur diagnostic, elles sont à 100 % en contrôle de leur corps. »

Karen vérifie et approuve chaque artiste tatoueur, car elle s’est rendu compte que certains entraient en contact avec elle pour de mauvaises raisons. « Ça ne m’intéresse pas de travailler avec quelqu’un qui ne cherche qu’à avoir plus de vues ou de j’aime sur son profil Instagram. »

Les artistes qu’elle choisit comprennent qu’il ne s’agit pas d’eux, mais de ce que la personne désire. Ils ont besoin de se sentir à l’aise pour travailler sur le tissu cicatriciel et sur une peau affectée par la radiothérapie qui a perdu beaucoup de son élasticité.

Photo : Lee Nisar, utilisée avec permission

Ils doivent aussi comprendre les limites à respecter quand on tatoue une personne souffrant de lymphœdème.

La communauté des artistes tatoueurs a répondu de façon admirable. Chaque année, à plusieurs reprises, Karen organise une Journée EMPOWERink dans quelques villes canadiennes dont Montréal, Québec, Toronto et Oshawa. Elle espère ajouter Edmonton, l’an prochain.

Ces jours-là, les artistes rencontrent des survivantes du cancer du sein pour créer le tatouage artistique que chacune a choisi. Tout ceci, gratuitement.

« Il y a 4 ans, nous pouvions fournir des tatouages à 3 ou 4 femmes par an, dit Karen. Je travaillais avec un tatoueur de renom qui en a parlé avec ses amis artistes. Ils ont tous voulu participer et maintenant, nous pouvons offrir 25 tatouages par an. »

Est-ce qu’un tatouage sur mastectomie est la bonne solution pour vous ?

Se faire tatouer est une décision personnelle. D’autres solutions peuvent mieux vous convenir. Si vous êtes indécise, Karen vous recommande d’en discuter avec votre médecin. (En particulier, les tatouages sont déconseillés aux femmes atteintes d’un cancer du sein inflammatoire.)

« Je ne suis pas une professionnelle de la santé, prévient-elle. Alors, si quelqu’un me demande si le tatouage risque d’être dangereux, je lui recommande d’en parler à son médecin. Cela dit, nous avons fait près de 65 tatouages jusqu’à présent et n’avons jamais eu de problème ».

Pour pouvoir vous faire tatouer, il faut laisser passer au moins un an après l’opération. Vous devez aussi fournir une photo de votre poitrine avec votre demande. Ainsi, Karen et son équipe peuvent déterminer si le tatouage est une bonne option. Ce n’est pas toujours le cas.

Photo utilisée avec permission.

Si vous savez quel type de tatouage vous souhaitez, c’est parfait, mais ce n’est pas essentiel. « Il se peut que vous ne sachiez pas ce que vous voulez, mais mon Instagram contient probablement tous les genres de tatouage sur mastectomie que vous pouvez imaginer. Les femmes y trouvent leur inspiration et m’envoient 5 photos qu’elles aiment. Ça me permet de les jumeler avec l’artiste le plus approprié ».

Recourir au tatouage après une mastectomie peut changer une vie

En regardant l’Instagram de Karen, il est impossible de ne pas être ému.e par les sourires, les rires et les larmes de joie de ces femmes qui découvrent pour la première fois leur poitrine avec leur tatouage tout neuf.

 

Et cela contribue à changer les attitudes vis-à-vis des options offertes aux femmes après une mastectomie. Même les hommes traités pour un cancer du sein optent pour le tatouage.

« Ma plus récente opération a eu lieu juste avant la pandémie et ma plus grande préoccupation était de savoir si ça aller ruiner le tatouage, explique Karen. Mon chirurgien m’a rassurée : je ne toucherai pas au tatouage, il est bien trop beau. Vous voyez, il y a des chirurgiens qui comprennent bien les conséquences que la chirurgie reconstructive peut avoir. Mais ils ne savent pas ce qu’ils ne savent pas. C’est alors à la patiente de discuter les autres alternatives pour les éclairer. »

Vous pouvez consulter le compte Instagram de Karen : https://www.instagram.com/empowerink.ca/

 

Si vous êtes porteuse de la mutation du gène BRCA, vous pouvez vous joindre au groupe BRCA Sisterhood de Facebook afin d’échanger avec d’autres femmes qui vivent la même situation. Le groupe est privé, alors n’hésitez pas à contacter Karen si vous souhaitez en faire partie.